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emmanuelle&jp
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15 mai 2012

Les pilotis s’en sont allés…

Beaucoup d’entre vous qui nous ont fait l’amitié de nous rendre visite à Siem Reap se rappellent les bords de la rivière et le charme des maisons sur pilotis.

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Certes, au moment des inondations régulières du mois d’octobre, au moment où le Tonlé Sap gonflé par les eaux du Mékong pousse les eaux à l’intérieur des terres, la vie pour les riverains se traduisait généralement par les pieds dans l’eau, sans compter l’insalubrité évidente… Et nous de nous inquiéter qu’un courant plus fort et plus haut ne les arrache à la berge. Mais tout cela était bien arrimé, les pilotis enfoncés profondément dans le lit de la rivière, pour que jamais pareil sinistre somme toute naturel n’arrivât.

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On savait ces installations qui datent de l’arrivée des derniers réfugiés des camps à la frontière en Thaïlande seraient tôt ou tard condamnées. De fait, les habitants ont reçu l’ordre en mars de déguerpir avant le 1er avril, tout matériel resté sur place devant être balayé par les pelleteuses. Je ne le savais pas encore quand, en partant travailler le 26 mars, j’ai pilé net pour prendre quelques clichés de l’effervescence de la démolition commencée dès le lever du jour. C’est qu’il ne leur restait que 5 jours pour tout démonter.

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Plutôt que de poursuivre sur la rive est comme chaque matin pour aller à Sala Baï, j’ai traversé la passerelle pour voir de près les travaux.

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Pas question de laisser quoi que ce soit sur le rivage, tout a été minutieusement démonté et embarqué sur des véhicules de fortune, du plus petit morceau de bois aux briques des fondations sur la rive. Même les pilotis ont été récupérés.

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En amont, de l'autre côté de la passerelle, fini le charme de ces deux petits garçons occupés à jouer en équilibre au-dessus de la rivière...

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Même spectacle de désolation, de démolition, de récupération d’autant que les riverains ainsi déplacés à qui on avait promis un lopin de terre à 15 km de là et quelques planches pour reconstruire leur maison, n’ont en réalité rien reçu du tout. Ils ont bien essayé de revendiquer la promesse, mais rien n’y a fait.

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Cependant, un certain nombre d’entre eux, mécontents de quitter leur clientèle du bord de la route, se sont installés dans une rue transversale à leur quai. Pour ceux qui sont venus à Siem Reap, il s’agit de la piste qui mène au restaurant de Sobey. Il n'y avait aucune habitation... En un rien de temps, boutiques et échoppes faites de tôles de récup’ sont apparues comme par enchantement, avec enseignes et panneaux de signalisation des tarifs pour les passants du quai, leurs anciens clients !

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 Les plus industrieux aplanissent le sol avant d’y construire du dur.

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Au Cambodge, en raison de l’état des voies de circulation, on a toujours besoin de regonfler ses pneus ou de leur coller des rustines.

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Somme toute, la vie d’un nouveau village a commencé, animé par la joie de vivre des enfants, même si les installations sont encore bien précaires.

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Nul ne sait pourquoi les habitations sur pilotis ont été ainsi démolies sur ordre du gouverneur. Les bruits les plus divers circulent. On parle de l’aménagement d’une route à 4 voies ou de l’élargissement du lit de la rivière pour laisser libre cours au Mékong de remonter jusque-là… De similaires déplacements et travaux ont été entrepris en aval.

Il est vrai qu’on a beaucoup parlé des inondations à Bangkok l’année dernière mais nul n’a évoqué celles de Siem Reap où pourtant certains quartiers ont été sous l’eau pendant tout le mois d’octobre. De quoi décourager les touristes dont le nombre va croissant (+36 % pendant les quatre premiers mois de l’année par rapport à l’année dernière). Si cette complaisance diminuait, c’est la manne touristique qui manquerait au rendez-vous dont tout le monde pâtirait.
Des travaux majeurs accompagnés des mêmes déplacements ont été exécutés tout à fait en aval de la rivière où elle s’était répandue sur la route avec une telle force qu’elle l’avait totalement détruite. (cf. Reconstruction des infrastructures après les inondations, papier publié le 11 décembre 2011 sur ce blog). Les cars de la société coréenne qui exploite le port avaient été obligés d’utiliser une piste de traverse mettant à mal le confort des passagers…

La population du Cambodge souffre encore de l’occupation vietnamienne longue de dix ans, jusqu’aux Accords de Paris d’octobre 91, et du retour au pays après l’évacuation des camps de réfugiés. Les Vietnamiens avaient décrété que les premiers arrivés devenaient de fait prioritaires des lieux sauf si les précédents propriétaires pouvaient montrer des documents faisant foi de leurs droits. Tous les cadastres ayant été détruits par les Khmers rouges, inutile de dire que fort peu ont pu en faire état, à part les plus prudents qui avaient réussi à cacher leurs documents. D’autres enfin, préfèrent vivre modestement plutôt que de demander au gouvernement actuel de récupérer leur bien occupé par d'autres, et par là lui faire allégeance.

Des villages entiers sont déplacés au gré de juteuses concessions à de grandes firmes étrangères. La population de Siem Reap n’y échappe pas. Les pelleteuses se sont mises en route et aplanissent un terrain entièrement nettoyé. Malgré la vive inquiétude de tous, les arbres ont été épargnés, pour le moment...

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18 mai : cet article paru dans la rubrique Cambodge du Petit Journal sur ce sujet vous aidera à comprendre la gravité et l'ampleur de ce sujet ici.

http://www.lepetitjournal.com/cambodge/en-bref-cambodge/107573-kratie-une-fille-de-14-ans-tuee-par-balle-dans-une-manifestation.html

 

 

 

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